TOXI-INFECTIONS ALIMENTAIRES (intoxination) A STAPHYLOCOQUES



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Ce texte vous propose une explication générale sur les Staphylococcus aureus. Vous y trouverez notamment :

 

 

La maladie des causée par l'ingestion d'une toxine sécrétée par des souches toxigènes de Staphylococcus aureus. On trouve des staphylocoques dans le nez, gorge et la peau; ils peuvent donc facilement contaminer les aliments. Ils peuvent aussi provenir de porteurs ou de personnes atteintes d'infections pyogènes (abcès, phlegmons, panaris, ostéomyélite (infection osseuse grave), furoncle, anthrax, acné, angine, rhinite, plaie, septicémies, lésion suppurée et nécrotique...). Pasteur découvrit le staphylocoque dans le pus d'un furoncle en 1880). L'anthrax résulte du groupement de plusieurs furoncles.

La durée est courte 6 à 48 H. La guérison est complète dans presque tous les cas. La guérison des manifestations aigües survient rapidement (2 à 5 H) mais le manque d'appétit et les diarrhées peuvent continuer pendant 1 ou 2 jours.

Chez les très jeunes enfants et chez les individus à résistance diminuée, un état de choc et la mort peuvent survenir à la suite d'une déshydratation brutale que provoquent les vomissements et les diarrhées. Mais les cas sont rares. La mortalité provient également d'accidents cardio-vasculaires résultant essentiellement de vomissements violents.

Les symptômes apparaissent rapidement (1 à 2 heures, jusqu'à 6 heures); il s'agit au début de salivation abondante, de nausées, de céphalées, de maux de tête, de vomissements (violents, incoercibles et répétés), sueur, troubles neurologiques (prostration jusqu'à collapsus), fortes douleurs abdominales et de diarrhée sévères. Il n'y a généralement pas d'élévation forte de température, quelque fois une légère hyperthermie (jusqu'à 38°C), ou au contraire une hypothermie (cas sévères chez les nourrissons et les vieillards). Les cas sévères sont accompagnés de déshydratation et de rejet de sang et de mucus dans les selles et de vomissements.

La quantité d'entérotoxine avalée (dans le tube digestif) détermine le moment d'apparition des symptômes, ainsi que leur gravité. Il faut 500.000 à 5.000.000 germes/g pour déclencher les troubles. On a expérimenté chez les humains qu'une personne de 70 kg présente des symptômes à partir de 3.5 ug d'entérotoxines consommés. On estime cependant que chez des sujets sensibles 100 ng pourraient être suffisants.

Les animaux sont moins sensibles que l'homme à l'action des entérotoxines.

Il n'existe pas d'antibiotiques pour traiter les toxi-infections à staphyloques (mais "tube digestif" de H. LECLERQ parle d'antibiotique B-lactamines dans les situations graves). La plupart des B-lactamines (pénicillines G et V, ampicilline, céphalosporines) peuvent être inactivées par des B-lactamases et pénicillinases.

Dans le cas de déshydratation grave (à la suite d'une diarrhée), on recommande l'administration de liquides par voie intraveineuse.

 

Les milieux favorables à son développement

Les aliments qui facilitent la croissance des staphylocoques sont principalement les pâtisseries à la crème, les crèmes glacées, les aliments traités tels que les jambons, les pâtés et rillette, et les salades de pomme de terre, de volaille et de thon. Les produits cuits contaminés après cuissons (viandes hachées, poissons, tranches de charcuterie). Les produits à teneur en eau réduite (salaisons, poissons séchés et fumés, lait en poudre). Les fromages, à la suite d'une acidification insuffisante du caillé. Les ovoproduits, mayonnaise, produits laitiers (ex. lait concentré), crèmes, glaces. Les aliments contaminés ont le même aspect (apparence, odeur, goût) que les aliments sains. Il y a même déjà eu des intoxications après consommation de conserves de légumes et de fruits.

La meilleure méthode de prévention est la réfrigération (respect de la chaîne du froid). Une erreur capitale consiste à préparer le repas trop longtemps à l'avance puis à laisser les plats à température ambiante jusqu'à leur consommation. Ne pas travailler lorsqu'on a une lésion cutanée pyogène ou lorsqu'on est porteur de staphylocoques toxigènes.

S. aureus se multiplie plus facilement en aérobiose qu'en anaérobiose. Il exige des acides aminés et des vitamines. Il est mésophile. Il est en général inhibé en présence d'une flore compétitive importante. Il est sensible à l'acidité. Il tolère des concentrations élevées de NaCl et des Aw relativement basses (>0.90). Il survit longtemps dans des aliments déshydratés ou congelés.

C'est un thermosensible : des populations de 10^6 S. aureus/ml peuvent être complètement inactivées en 4-24 mn à 54-60°C. L'entérotoxine B est détruite après exposition à 100°C pendant 90 minutes ; l'entérotoxine A est détruite à la même température en une minute. La thermorésistance est encore beaucoup plus élevée dans les aliments. Cependant certains constituants du milieu (lipides, protéines, sucres, sels) peuvent le protéger de la chaleur.

Les cellules bactériennes endommagées par les différents traitements subis (chauffage, congélation, choc osmotique, acidité) reprennent de leur activité normale après un temps de réparation.

Quelques facteurs de croissance et de toxinogénèse chez S. aureus

 

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Facteur Croissance production d'entérotoxines

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Température 6 - 46°C 10 - 45°C

Température optimum 37°C 40°C

pH croissance mini = 4,2, opt. 7-7,5, max. 9,8

pH toxicogenèse mini = 5

NaCl 0 - 20 % 0 - 10 %

NaCl optimum 0 % 0 %

aw mini pour croissance = 0,90

aw mini pour survie =0,85

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L'entérotoxine est une exotoxine protéique, inodore, incolore et thermostable : elle résiste à l'ébullition pendant 30 mn. Mais sa résistance à la chaleur dépend de plusieurs facteurs (sérotype, concentration, degré de pureté, nature du milieu). Pratiquement, les entérotoxines ne sont pas complètement inactivés dans des conditions normales de cuisson ou de pasteurisation, procédés habituels d'assainissement culinaire.

Les entérotoxines résistent à l'action d'enzymes protéolytiques du tube digestif, trypsine, chymotrypsine, rénine, papaïne, pepsine.

Les températures minimales et maximales de développement sont respectivement de 6 à 8°C et de 45°C. Il se multiplie facilement à des pH variant entre 4,0 et 9,8 même s'il affectionne plutôt les pH légèrement acides. Il se développe dans des milieux dont l'Aw est de 0,86 et tolère des concentrations en NaCI de l'ordre de 10 à 15 %.

 

 

Biologie des staphylocoques toxi-infectieux

Selon la classification du "Bergey's Manual of Systematic Bacteriology", les staphylocoques font partie de la famille des Staphylococcaceae (requête google à ce sujet).

Ce sont des cocci à Gram +, non sporulés, immobiles, de 0.5 à 2.5 µm de diamètre (moyenne : 0.8 à 1 µm). Se divisant en plusieurs plans en formant des amas irréguliers, ils sont immobiles. Ils sont catalase + et ont un métabolisme respiratoire et fermentatif. Ce sont des bactéries aéro-anaérobies facultatives. Phosphatase +. Leur paroi est principalement constituée de peptidoglycane dans lequel se trouve l'acide aminé L-lysine et la D-alanine.

La majorité des souches sont coagulase + : elles coagulent le plasma humain citraté ou oxalaté en catalysant la transformation du fibrinogène soluble en fibrine insoluble (fibrinolysine staphylokinase).

Dans l'organisme, la coagulase entraîne la formation d'un caillot endoveineux de fibrine, protégeant le germe de la phagocytose et induisant la pullulation microbienne. Cette enzyme est sécrétée dans le milieu environnant pendant la phase de croissance du germe : c'est une exoenzyme encore appelée coagulase libre. Tandis que la coagulase liée au corps bactérien interviendrait in vivo en protégeant les staphylocoques de l'action phagocytaire.

 

Elles cultivent sur des milieux contenant 5 % de chlorure de sodium et pour certaines jusque 10 et même 15 %. Les staphylocoques fermentent les sucres en produisant abondamment de l'acide lactique. Ils peuvent aussi puiser l'énergie indispensable à leur métabolisme par respiration ; ils possèdent en effet une chaîne de transport électronique adaptée et en particulier des cytochromes et d'autres chromoprotéines prophyriniques.

Seulement certaines souches de Staphylococcus aureus produisent une entérotoxine ; celle-ci est de nature protéique. Seule une multiplication importante de S. aureus entérotoxinogènes (>10^5/g) permet une production d'entérotoxines en quantité notable dans l'aliment et ceci lorsque les conditions sont favorables à la toxinogénèse.

Les entérotoxines sont des métabolites excrétés dans le milieu de culture au cours de la croissance bactérienne. Ce sont des protéines globulaires formées d'une seule chaîne polypeptidique dont le poids moléculaire est compris entre 28 000 et 35 000 daltons. Ces entérotoxines peuvent être considérées comme des neurotoxines. En effet elles activent des récepteurs de la paroi intestinale dont le stimulis parvient jusqu'au centre du vomissement à travers le nerf vague.

On reconnaît au moins 7 entérotoxines différentes, appelées A, B, C1, C2, C3, D, E1 et TSST-1 (Toxic Shock Syndrome Toxin-1 "anciennement F". Les plus fréquemment impliqués dans les TIA (80 % des cas) sont les entérotoxines A (65 % en France) puis la décroissance D, C et B. Le biotype B serait la deuxième cause de TIAC en France (20 %) selon "ALIMENTATION ET NUTRITION HUMAINE" de H.DUPIN. Les biotypes E, initialement décrits ont été regroupés en une espèce nouvelle : S. intermedius, fréquemment rencontrée en pathologie animale. L'entérotoxine E est très rarement détectée.

Les entérotoxines sont faiblement antigéniques : 7 entérotoxines ont été purifiées depuis 1959, et identifiées par leur réaction avec des immunsérums spécifiques. Les entérotoxines C1, C2 et C3 possèdent le même site antigénique majeur et sont souvent regroupées sous la dénomination d'entérotoxine C. Les staphylocoques peuvent produire d'autres entérotoxines non identifiables par une méthode sérologique.

La production d'entérotoxines B et C est contrôlée par des plasmides et s'effectue principalement à la fin de la phase stationnaire de croissance, tandis que la production des entérotoxines A, D et E est sous contrôle chromosomique et survient essentiellement pendant la phase logarithmique de croissance. Quelques heures (3 à 4) à température ambiante sont nécessaire pour que les staphylocoques se multiplient suffisamment et produisent des entérotoxines dans les aliments.

Une souche de staphylocoque peut produire 2 ou 3 sérotypes en même temps. Le gène de structure des entérotoxines est chromosomique. Cependant, certains souches ne produisent l'entérotoxine B qu'en présence d'un plasmide qui pourrait être porteur de gènes de régulation ou d'expression.

 

Diagnostic biologique des toxi-infections à staphylocoque

S. aureus élabore un pigment caroténoïde qui donne aux colonies une coloration jaune ou orange. La présence de ce pigment permet d'identifier S. aureus. Mannitol +, Maltose +. Production d'acetoïne. La paroi de S. aureus renferme des acides teichoïques responsables de la fixation de bactériophages spécifiques.

Deux méthodes différentes de sérotypage, la méthode de PILLET te la méthode de OEDING et HAUKENES ont été décrites. L'absence de méthode standard reconnue au niveau international et de sérums commerciaux fait que la sérotypie est peu utilisée dans la pratique comme outil épidémiologique. Par contre la lysotypie qui consiste à typer des souches en fonction de l'activité lytique d'une batterie de phages est reconnue sur le plan international et est plus largement utilisée en tant qu'outil épidémiologique. Une série de 23 phages est utilisée pour classer l'espèce en différents lysotypes. Les souches de S. aureus appartiennent principalement aux lysotypes I,II,III,IV.

On peut confirmer le diagnostic clinique en examinant un frottis gram de la nourriture suspecte afin de rechercher de nombreux coques gram +. On peut isoler les staphylocoques hémolytiques coagulase + et donner les filtrats de culture à des volontaires ou à des animaux de laboratoire. Des réactions sérologiques, comme la diffusion en milieu gélosé ou l'immunofluorescence, permettent d'évaluer la présence de l'entérotoxine. Il faut pour ce faire un échantillon minimal de 100 g, car la recherche d'entérotoxines est longue et laborieuse.

Le milieu d'enrichissement est employé dans le cas d'aliments susceptibles de ne renfermer qu'un petit nombre de S. aureus, plus ou moins stressées. On utilise le milieu de GIOLITTI et CANTONI additionné de TWEEN 80. Lancette (1986) recommande le bouillon trypticase soja additionné de chlorure de sodium (10 %) et de pyruvate de sodium (1 %). Les tubes de milieux ensemencés sont placés à l'étuve à 37°C t des isolements sur milieux sélectifs solides sont effectués après 24 et 48 heures d'incubation, afin de mettre en évidence des colonies de S. aureus.

Le milieu d'isolement le plus employé en bactériologie alimentaire est le milieu de BAIRD PARKER car c'est celui qui donne le meilleur taux de récupération des cellules stressées de S. aureus. C'est un milieu riche et complexe comprenant 3 agents sélectifs (tellurite de potassium, glycine et chlorure de lithium), un activateur de croissance (le pyruvate de sodium) et un agent protecteur contre l'effet toxique du tellurite (le jaune d'oeuf).

Sur ce milieu, les colonies de staphylocoques pathogènes apparaissent, après 24 heures d'étuve à 37°C sous forme de points sont noirs (réduction du tellurite), brillants, bombés, cerclés d'un liseré blanc opaque et entourés d'une auréole d'éclaircissement (dégradation d'une lipoprotéine du jaune d'oeuf). Mais ce milieu n'est pas très précis, en conséquence, il faut réaliser des tests d'identification complémentaires.

Un autre milieu utilisé est celui de CHAPMAN qui, grâce à sa forte teneur en NaCl, inhibe la croissance de la plupart des bactéries autres que le staphylocoque et donne en même temps une indication quant à l'action sur le mannitol de la souche isolée ; il est en fait rarement utile en bactériologie médicale.

 

 

Autres types d'infections staphylococciques

S. aureus peut aussi être responsable chez l'homme d'infections pyogènes de la peau et des muqueuses (furoncle, impétigo, panari staphylococcies bulleuses) de septicémies, d'intoxinations alimentaires, d'entérocolites aiguës qui surviennent à la suite d'un traitement antibiotique prolongé et qui sélectionne, au sein de la flore intestinale, une souche résistante de staphylocoques, productrice d'entérotoxine.

La Responsabilité des staphylocoques autres que S. aureus dans les TIAC, est difficile à évaluer car :

- ils ne sont pas habituellement recherchés. La contamination par S. intermedius est peu probable car S. intermedius n'est isolé que chez certaines espèces animales (chien, chat, cheval, pigeon, renard, vison). S. hyicus et staphylocoques à coagulase - doivent être des contaminants plus fréquents : ils sont isolés dans le lait de vache. S. hyicus est isolé chez les porcs, bovins, volailles et chevaux. Il peut donc contaminer les aliments et poser un problème d'identification pour l'analyste parce qu'il partage certains caractères importants avec S. aureus.

- ils semblent produire des entérotoxines en quantité plus faible que S. aureus et ce sont parfois des entérotoxines non identifiables par les méthodes habituelles.

- Enfin, les rares souches de staphylocoques à coagulase - impliquées dans les TIA pourraient être des souches mutantes de S. aureus ayant perdu leur aptitude à produire la coagulase (de plus en plus craint dans les hôpitaux à cause des antibiotiques) ou des staphylocoques ayant atteint des sujets immunodéprimés.

S. epidermidis un pathogène opportuniste

S. saprothyticus une espèce prédominante dans les infections urinaires de la jeune femme (cystites).

S. warneri est rencontré dans certaines infections humaines (septicémies, endocardites, conjonctivites, infections urinaires).

Les humains sont les plus importants réservoirs. Quand apparaissent des cas d'intoxication à staphylocoque, il est habituellement possible de démontrer que la souche de staphylocoque dans la nourriture contaminée est la même que celle présente sur les mains de ceux qui ont manipulé cette nourriture. Une recherche dans les vomissures et dans les selles pour trouver des S. aureus de même lysotype que dans l'aliment.

Lorsque les staphylocoques ne sont pas revivifiables (cas d'un aliment réchauffé ou trop acide) et que la mise en évidence des entérotoxines n'est pas possible, deux tests supplémentaires permettent de fournir des renseignements utiles :

* l'observation microscopique de nombreux cocci à Gram + en amas dans l'aliment suspect,

* la détection de thermonucléase dans l'aliment suspect. Sa présence est l'indice d'une croissance importante de S. aureus (plus de 10^6/g).

 

Page modifiée le 31/05/99 par B.PEIFFER