Botulisme |
Clostridium botulinum a été découverte en 1896 par van Ermengem de Gand.
Le botulisme demeure la principale cause de mortalité par empoisonnement alimentaire.
Le botulisme peut aussi se contracter à la suite de l'infection d'une blessure par C. botulinum ; ce dernier sécrète la toxine pendant sa croissance dans les tissus nécrosés.
BIOLOGIE DE CLOSTRIDIUM BOTULINUM
Le germe et ses
spores
C. botulinum
est un bacille gram + aux extrémités arrondies ; il est
anaérobie strict et produit des spores résistantes à
la chaleur (thermorésistantes. La résistance est plus
grande encore en milieu huileux.
Les organismes mesurent de
0,3 à 1,5 µm par 2 à 9 µm. Les spores sont
ovales, subterminales et légèrement déformantes.
Grâce à ses flagelles péritriches, C. botulinum
est mobile (ciliature péritriche).
Les milieux
favorables à son développement
Où
peut-on trouver le germe ?
C. botulinum est présent en
grand nombre dans les milieux terrestres et les sédiments
aquatiques (eaux douces et eaux marines). Quand les spores se
trouvent dans un milieu favorable à leur croissance, comme des
aliments ou une blessure, elles peuvent germer et produire des
cellules végétatives toxigènes.
Le mot latin
botulus signifie "saucisse". On a assimilé pendant
longtemps cette maladie à la saucisse non cuite. On sait
maintenant qu'elle intervient dans des conserves peu acides mal
stérilisées (fruits, légumes tels que haricots
verts, poivrons et asperges, viandes et poisson) ou dans certains
aliments comme le poisson fumé que l'on a pasteurisé
pour éviter une dégradation de ses qualités
organoleptiques. Conservation sous graisse (salaison, fumage).
L'aliment le plus souvent en cause dans le botulisme en France reste
le porc (jambon salé ou fumé, lard, pâté
en terrine, saucisson, charcuterie) de préparation artisanale
ou familiale ; en ce qui concerne les jambons, la cause la plus
fréquente (88 % des cas) est le jambon à l'os de
préparation familiale.
Des fromages à pâte
molle ont été incriminés dans quelques foyers.
Les fromages fondus sont à priori plus favorables à la
croissance de Cl. botulinum par suite du pH peu acide, de l'addition
d'autres éléments nutritifs, de l'anaérobiose
résultant du traitement et de l'emballage. La production de
toxine dans ce type de fromage a été démontrée
et l'on a cité deux accidents vers les années 50
attribuables au fromage fondu.
LE PRELEVEMENT DE JAMBON DOIT SE
FAIRE AU VOISINAGE DE L'OS ET SURTOUT DES PARTIES MUSCULAIRES QUI
APPARAISSENT GRISATRES ET DELACEREES PAR LES GAZ.
Les aliments
contaminés n'ont pas nécessairement une apparence ou
odeur différente des aliments sains. Cuisson parfaite des
aliments (120°C pendant 4 mn 100°C pendant 10 mn ou 80°C
pendant 30 mn - voir les normes officielles pour les professionnels),
car quand la température revient à la normale, les
endospores germent, donnent des bactéries végétatives
qui sécrètent la toxine.
Dans le cas des produits
carnés, salés, fumés et mis en boîtes, à
l'action du traitement thermique s'ajoute l'effet du sel qui réduit
l'activité de l'eau et celui du nitrite de sodium. L'action
conjointe de ces deux derniers facteurs empêche la croissance
des spores préalablement endommagées par le choc
thermique (effet subléthal).
Dans les aliments pauvres en
protéines, comme les légumes, il n'y a aucune odeur
malgré la production de toxines ; ces germes fermentent les
hydrates de carbone ce qui provoque la formation de gaz, mais cela
n'est pas toujours fort évident. Le C. botulinum provoque
souvent la formation d'acide butyrique au dépens du glucose,
ce qui communique aux conserves altérées une odeur de
beurre rance.
Il n'est pas possible de fixer des barèmes
généraliste de stérilisation car ceux-ci
changent en fonction de la nature du produit et de son contenant. Par
contre, l'Institut APPERT ( institut national de la conserve 44, rue
d'Alésia - 75682 PARIS CEDEX 14 - Tel : 01 43 21 38 21.) édite
des barèmes de stérilisation pour chaque type de
conserve.
A titre indicatif, pour des préparations
contenant un minimum de 50% de foie gras le barème est de 120
minutes à 110-111°C pour des bocaux en verre de 21cl.
Quelques températures importantes pour Clostridium botulinum
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Temperature optimale |
Temperature minimale |
||
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Type E |
Autres types |
Type E |
Autres types |
Croissance |
30°C |
34-37°C |
5°C |
15-20°C |
Toxinogénèse |
28 - 30°C |
34°C |
5°C |
15°C |
Sporulation |
15 - 41°C |
15 - 41°C |
|
|
Germination |
37°C |
37°C |
>=10°C |
>=10°C |
Emergence |
31 - 37°C |
31 - 37°C |
>10°C |
>10°C |
Le pH
C. botulinum se développe à des pH voisins de la neutralité (optimum 8.2-8.5). Sa croissance est considérée comme non possible à un pH inférieur à 4.5, à condition que cette acidité agisse dans toute la masse et qu'aucun autre microorganisme n'accompagne les spores de Cl. botulinum ; en effet la présence de germes assimilant les acides organiques peut conduire à une augmentation dangereuse du pH. Il a été montré que certaines souches étaient capables de se développer à pH < 4.5. Le chlorure de sodium supérieur à 10/1000 est, selon la concentration, inhibiteur de la croissance.
La concentration de NaCl
Concentration de NaCl compatibles avec la croissance et la germination de Clostridium botulinum
-------------------------------------------------------------
Croissance Germination
et émergence
-------------------------------------------------------------
Types A et B <=9 % <=10 %
Type E 5.6 % <=10 %
-------------------------------------------------------------
Les différents sérotypes (A à G)
On a isolé
huit sérotypes de C. botulinum, classés uniquement
selon les différences antigéniques de leurs
neurotoxines (A, B, C1, C2, D, E, F, et G). Ce sont des protéines
solubles comprenant jusqu'à 20 acides aminés et qui
toutes, à l'exception de la toxine C2, ont une action
neurotoxique en empêchant la libération des
neurotransmetteurs à la jonction neuromusculaire ; la toxine
botulique est donc neurotrope.
Les types A, B, E et plus rarement
F sont pathogènes pour les humains. Les types A et B
proviennent du sol tandis que les types E et F sont d'origine
aquatique.
Les type F et G sont relativement rares dans la
nature.
Chaque toxine botulique détermine dans l'organisme
l'apparition d'une antitoxine spécifique qui neutralise
exclusivement le type de toxine correspondante.
Le type A
Le type A est le plus
toxique et le plus fréquemment incriminé dans le
botulisme humain. Le type A et la plupart des souches du type B sont
protéolytiques. Il est particulièrement fréquent
aux U.S.A, rare en France.
Le type B
Le type B, moins toxique
pour l'homme, est le plus répandu. C'est le bacille européen
(plus de 96 % des foyers en France). Trouvée principalement
dans le porc.
Le types C
Les types C et D sont
pathogènes pour les autres mammifères (C pour le
cheval, D pour les bovins) et les oiseaux.
De par le monde,
5 ou 6 foyers de botulisme humain de type C ont été
rapportés dans la littérature, et ont concerné
tout au plus 10 personnes.
Le botulisme C apparaît
comme une maladie très rare chez l'homme et il n'y a, a
priori, pas de raison pour que ce type soit plus sous-diagnostiqué
que les autres. La rareté des botulismes humains de type C est
évidente, mais on ne peut plus en nier l'existence comme cela
a été fait sur la base des données fragmentaires
publiées jusqu'en 1970.
Des foyers ayant concerné
plusieurs centaines de milliers d'oiseaux ont par exemple été
observés aux USA en 1910 et 1932.
L'Europe a aussi
été concernée et des foyers affectant des
oiseaux sauvages ou d'élevage ont été décrits
en Scandinavie, Grande-Bretagne, Hollande, Belgique, Allemagne,
Tchécoslovaquie, Italie et Espagne. En France - si l'on exclut
le botulisme C des visons d'élevage qui a été
éradiqué par une vaccination systématique dans
les années cinquante, et quelques foyers de botulisme bovin C
- la maladie n'a été en cause que dans un petit nombre
de foyers d'oiseaux sauvages ou d'élevage, inférieur à
5 par an jusqu'en 1994.
Les demandes de diagnostic de
botulisme au Centre de référence sur les anaérobies
(CNR) ont beaucoup augmenté en 1994 et 1995. En raison de ces
épizooties aviaires qui se sont d'ailleurs poursuivies en 1996
(données non publiées), il est bon de réexaminer
le risque botulique C pour l'homme. Ceci est d'autant plus nécessaire
que ces foyers de botulisme en zone aquatique peuvent aussi concerner
les poissons. Par exemple, lors de l'épizootie du lac de
Grandlieu en 1995, la toxine botulique C a été
retrouvée dans un cadavre de brochet et dans des écrevisses,
mais n'a pas été mise en évidence chez une
dizaine d'anguilles capturées vivantes. Les viscères de
poissons et les écrevisses peuvent héberger la spore de
C. botulinum. Les poissons sont peu sensibles à la toxine de
type C, mais peu d'études de toxicité ont été
menées. Le risque botulique pisciaire doit aussi être
l'objet d'une surveillance épidémiologique.
(Ce
texte comporte notamment des extraits du BEH 02/1997 Le risque
botulique C chez l'homme)
Le type D
Le type D, rare chez
l'homme (un seul cas connu dans le monde), se trouve dans le fourrage
en Afrique du Sud et atteint le bétail.
Le type E
Le type E, toxique pour
l'homme, se trouve surtout dans le poisson et les produits dérivés.
Surtout rencontré au Japon, au Canada, en Russie, et dans les
pays du Grand-Nord.
Le type F
Le type F, semblable aux
types A et B, a été isolé au Danemark.
Le type G
Le type G est responsable
de morts subites chez le nourrisson. Il a été isolé
dans le sol d'Argentine.
NATURE DE LA PATHOGENICITITE DU BOTULISME
La toxine
La neuro-toxine botulinique
est le plus puissant poison connu. Un mg de cette toxine peut tuer
plus de 33 milliards de souris. La dose minima mortelle est de
l'ordre de 30 pg/kg. Il faut 10 fois plus de toxine tétanique
et 40 000 000 de fois plus de cyanure pour atteindre une telle
toxicité. Son poids moléculaire est très élevé
(150.000 à 940.000 ).
Elle est de nature protéique
et thermolabile en produisant des endospores résistantes à
la chaleur. C. botulinum sporule tant en milieux de culture que dans
la nature (saprophyte des eaux stagnantes, sol) ou les aliments. Il
s'agit d'une intoxication alimentaire senso-stricto, parfois désignée
intoxination.
La toxine est thermolabile et résistante
aux acides et aux sucs digestifs.
Comment agit cette toxine
Le
poison attaque les nerfs (moteurs et parasympathiques) et entraîne
une paralysie du pharynx et du diaphragme. Dans le cas de paralysie
respiratoire, il faut pratiquer une trachéotomie et utiliser
des respirateurs artificiels. La toxine agit en inhibant la
libération d'acétylcholine (un médiateur
chimique sécrété par les synapses et intervenant
dans la transmission de l'influx nerveux jusqu'à la plaque
motrice 'jonction nerf-muscle') par les neurones. En effet, la toxine
se fixe aux extrémités efférentes des
neurones.
Le bacille botulique est incapable de se
multiplier dans l'organisme, donc d'y produire sa toxine. La maladie
est contractée au moment de l'ingestion de toxine botulinique
préformée dans les aliments mal conservés, comme
les conserves faites à la maison, dont l'ingrédient
incriminé peut être le poivre ou les fèves.
Absorbée par la bouche, la toxine n'est pas dénaturée
dans le tube digestif et franchit ainsi la muqueuse intestinale. Elle
gagne les plaques neuro-musculaires où elle inhibe la
libération de l'acétylcholine. Elle bloque ainsi le
passage de l'influx nerveux et détermine les paralysies.
DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT DU BOTULISME
Les symptômes
L'incubation est de 12 à
48 heures (généralement un jour) ; selon
l'administration américaine, elle peut atteindre 10 jours. Les
symptômes sont les suivants : céphalée,
difficulté d'élocution, pupilles fixes et dilatées,
dédoublement de la vue, diplopie, lassitude, dessèchement
de la bouche et du pharynx, impossibilité de tirer la langue,
nausées, douleurs abdominales, vomissements et paralysie
flasque des muscles de la déglutination (du pharynx) et du
diaphragme. C'est au cours de la période d'état que la
symptomatologie va s'affirmer ; les troubles oculaires vont
s'accentuer jusqu'à la paralysie de l'accomodation (mydriase
bilatérale) ; les troubles bucco-pharyngés deviennent
constants ; la dysphagie est douloureuse, la sécheresse de la
bouche s'accompagne de sensations de brûlure et d'une soif
intense ; la paralysie du voile du palais est moins fréquente.
Autres signes, faiblesse, fatigue, asthénie, amaigrissement.
La paralysie peut toucher aussi la vessie et tous les muscles
volontaires (striés).
Avant le développement de
l'assistance respiratoire, l'atteinte respiratoire causée par
le botulisme était à l'origine de bien plus de décès
qu'aujourd'hui. De 1910 à 1919, 70 % de mortalité, en
1980 plus que 9 % et en 1993 2 %.
La convalescence est lente, mais
il n'y a pas de séquelles permanentes.
Comment déterminer la présence de la toxine
Il faut démontrer la présence de la toxine botulinique dans le sérum ou les selles du patient, ou dans la nourriture ingérée. Une injection intrapéritonéale de sérum, d'extraits liquides des selles ou de la nourriture, à une souris, peut provoquer la mort de l'animal: les souris sont, en effet, très sensibles à la toxine. De plus, on peut cultiver des échantillons de selles ou d'aliments afin d'isoler l'organisme étiologique.
Le traitement
Le seul traitement du botulisme est la sérothérapie spécifique puisque c'est la toxine qui est responsable de toute la maladie et qu'il importe de la neutraliser avant qu'elle n'assure sa fixation irréversible. Comme l'antitoxine ne peut neutraliser la toxine lorsque cette dernière est fixée, il faut commencer le traitement à l'antitoxine dès qu'on soupçonne la présence du bacille botulinique. On utilise habituellement une antitoxine polyvalente des types A, B et E. Si on croit qu'une personne a mangé de la nourriture contaminée, il faut la faire vomir ou lui faire un lavage d'estomac ; on peut aussi lui donner un lavement. Chez les patients qui ont des problèmes neurologiques, la toxine circulante devrait être neutralisée par l'antitoxine trivalente ABE. Dans le cas d'une plaie infectée, il faut d'abord donner l'antitoxine, puis débrider la plaie, la drainer et l'irriguer.
Epidémiologie du botulisme
Données géographiques
Les
USA ont signalé depuis 1976 un nombre relativement important
de cas de botulisme chez le nouveau né de 2 à 24
semaines. Aux USA, le Center for Disease Control a relevé 140
cas en 1977, 130 cas en 1978 et 40 cas en 1979. En France, le nombre
des cas sporadiques est voisin de ces chiffres.
En 1974 une
épidémie a touché 45 personnes dans la région
de Marseille et 38 en Suisse : origine produits laitiers. Lors de
l'enquête, un fromage à pâte molle avait été
suspecté, mais il a été impossible de reproduire
la production de toxine dans le fromage quand il était
fabriqué avec du lait fortement contaminé. En revanche,
quand des fromages normaux étaient placés sur des
claies en paille contaminées avec des spores de Cl botulinum
de type B, de la toxine était retrouvée à la
surface du fromage en contact avec la claie, mais pas à
l'intérieur. Depuis, l'usage de paille stérilisée
est devenue obligatoire pour la fonction des claies à
fromage.
En juillet 1984 en France il y eut plusieurs cas de
botulisme dus à la consommation de conserves d'asperges
"miniatures" d'origine espagnole, consommées en
entrée sans avoir été réchauffées.
Le
botulisme infantile
Le botulisme de l'enfant a été
reconnu pour la première fois en 1976 ; il affecte les enfants
de moins de 12 mois. Dans le botulisme de l'enfant, la toxine est
sécrétée seulement après être passé
dans l'intestin et provoque l'abattement, la constipation et la
paralysie (ce type d'infection arrive rarement chez l'adulte). De
1976 à fin of 1993, 1,206 cas de botulisme de l'enfant ont été
confirmés aux USA. Le miel non pasteurisé est le seul
vecteur actuellement connu pour la transmission du botulisme de
l'enfant, à tel point qu'il a été conseillé
en Californie de ne pas donner de miel au nouveaux-nés.